Michel Huelin expose à l'abbatiale de Bellelay du 18 juin au 16 septembre 2006.
Le site de l'artiste présente cette exposition http://www.huelin.ch/
Entretien avec Michel Huelin 2003
J’ai rencontré Michel Huelin dans son exposition à Nyon à la galerie Confer art actuel. Il présente de nouveaux travaux issus de compositions sur ordinateur et inspirés par des formes organiques animales ou végétales. Un jardin botanique et zoologique imaginaire est proposé au visiteur. J'ai voulu lui poser quelques questions par courriel pour tenter de mieux saisir l’identité et l'origine de ces créatures.
1. Votre exposition à la galerie Confer art actuel s’intitule Invasive Species. A l’arrière de l’invitation vous caractérisez les êtres hybrides produits par votre logiciel : polymorphes, irréels, proliférants.
Pouvez-vous nous présenter quelques caractéristiques techniques de ces travaux et leur processus d’élaboration?
- Depuis plusieurs années mes travaux sont conçus à partir de recherches faites sur ordinateur. Dans un premier temps, il s'agissait d' esquisses préparatoires pour la réalisation ultérieure de peintures, l'infographie constituait alors essentiellement un champ d'expérimentation pour de nouvelles images. Actuellement, mes travaux recouvrent un champ plus large d'expérimentation, que ce soit des animations vidéos, des tirages numériques, des installations in-situ, des présentations internet, des publications ou des peintures.
Mes oeuvres récentes sont toutes réalisées à l'aide de logiciels tels que Cinema 4D et Vue 4. Ils permettent de créer un univers virtuel, complexe, mais de manière très intuitive. J'ai ainsi la possibilité de développer un travail personnel selon mes propres méthodes de travail. L'utilisation de l'ordinateur n'est pas une finalité, c’est simplement un outil qui permet une grande diversité de productions. L'utilisation d'images numériques élaborées à partir de logiciels 3D génère un ensemble de concepts qui prennent formes au travers de différentes techniques. Cette approche transdisciplinaire me permet de brouiller les pistes et de proposer diverses expériences artistiques qui se déclinent entre réalité et illusion. Les images virtuelles présentées à la Galerie confer art actuel montrent des formes irréelles, mais plausibles, qui évoquent des concepts à priori contradictoires, faits de mutations, de sensualité, d'ironie ou d'oppression.
2. Vous travaillez avec plusieurs modes d’expression, la peinture, le logiciel d'ordinateur qui permet d’aboutir à des produits photos; la vidéo; on peut encore mentionner des installations. Comment ces types d’approches s’associent-ils? Quelle sont les étapes du processus créatif de l'idée d'image à sa réalisation?
- Lorsque je travaille sur des images 3D, je ne sais pas encore sous quelle forme elles seront montrées. J’ai choisi un procédé ouvert, je n’exclus pas que telle image devienne un tirage photo, que telle autre soit animée ou s'intègre dans un dispositif plus complexe. Les images que je fabrique peuvent aisément être paramétrées et servir de base à de nouvelles animations vidéo ou alors rester à l’état de vibration dans une peinture. Cette méthode me permet de tirer le meilleur parti d’un concept plus général, où les mutations, les catastrophes naturelles, les anomalies peuvent s’enchaîner dans une sérénité trompeuse. Les mouvements réalistes donnés à des formes irréelles plongent le spectateur dans le doute, jouent sur la confrontation entre ce que l'œil voit et ce qu’il sait, entre le tangible et les images mentales.
Les éléments virtuels que je crée sont parfois d'origine animal ou végétal, parfois hybrides, parfois indéterminés et énigmatiques. D'autre part, ces éléments sont les constituants d'un environnement plus vaste, avec lequel ils interagissent. Ce monde virtuel, non réaliste, que je commence à développer, me permet de générer des réactions entre les différents éléments qui le composent. On pourrait parler d'une sorte de biotope virtuel: les individus sont interdépendants et agissent sur leur environnement. De même, les modifications de leur environnement modifient leur organisation. Divers comportements individuels ou de groupe peuvent alors être envisagés dans cet univers fictif. Le virtuel peut alors devenir un outil formidable pour parler du réel et de ses contraintes.
3. Il semble que vous soyez arrivé à une maîtrise technique qui vous donne une grande fécondité. Vous avez présenté deux expositions cette année, l’une consacrée à la peinture et l’autre ici au tirage sur papier photo de structures créées par ordinateur. Vous avez des projets pleins la tête et un véritable programme d’activité. Pouvez-vous nous parler un peu du rapport au temps dans les différentes techniques, peinture, création par ordinateur que vous utilisez? Et de vos projets futurs.
- Dans ma production, les notions de durée et de temps ont toujours été primordiales. Dans une période où la production d'images est abondante, travailler sur des images lentes, répétitives, hypnotiques agit comme un antidote à la consommation effrénée des images.
Pour la peinture, c’est une autre notion de durée qui est en jeu, le processus de réalisation est très lent. Mes gestes de peintre sont répétitifs, parfois interminables, mais c’est pour moi un moment de décélération, de réflexion, que j’aime opposer au côté éphémère de certaines images.
En ce qui concerne mes projets immédiats, j’inaugure le 11 décembre 2003 une grande installation dans le nouveau bâtiment de Science III à l’Université à Genève et ma prochaine exposition personnelle est prévue pour mai 2004, à la Galerie Zürcher à Paris.
Michel Huelin présente Invasive Species à la galerie Confer art actuel à Nyon jusqu’au 20 décembre 2003
Vous pouvez aussi visiter le site de Michel Huelin qui fournit des données biographiques et des exemples de son travail notamment plusieurs vidéos.
http://www.huelin.ch/
Patrick Schaefer, L'art en jeu, 18 novembre 2003
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