Ferdinand Hodler – Jean- Frédéric Schnyder

Cet article est fondé sur la visite de trois expositions de l’artiste Jean- Frédéric Schnyder, en 2007 à Bâle, en 2012 à Kriens près de Lucerne et en 2014 au Kunsthaus de Zurich jusqu’au 26 avril 2015.

Jean- Frédéric Schnyder, né en 1945, s’est d’abord fait connaître par des sculptures, des assemblages liés à la vie quotidienne. Puis il a abordé la peinture, à contre-courant de ceux qui pensaient que ce médium était mort, en suivant un concept, se fixant un objectif. En 1982 – 1983, il réalise 126 vues de Berne qui prennent en compte tous les éléments de la banalité du quotidien. En 1991, il peint une série de 90 salles d’attente de gares suisses toutes au format 30 x 42 cm. Deux ans plus tard il est remarqué à la Biennale de Venise avec une nouvelle série intitulée ironiquement Promenade pédestre consacrée à des vues de l’autoroute A1 qui traverse toute la Suisse d’est en ouest, faites depuis des ponts. Ayant quitté Berne pour Zoug il s’attache à un autre thème très délicat, le coucher de soleil en 1996/97 avec 163 toiles. Il est aussi un collectionneur passionné de cartes postales.

Zurich Kunsthaus: Ferdinand Hodler – Jean- Frédéric Schnyder jusqu’au 26 avril 2015

Dans une partie des salles habituellement consacrées aux collections, le Kunsthaus propose une étonnante rencontre, orchestrée par l’artiste Peter Fischli, entre Hodler et Jean-Frédéric Schnyder. Deux séries de peintures de Schnyder sont présentées : Berner Veduten 1982 – 1983 et une série consacrée au lac de Thoune, avec au centre le Niesen, réalisée du 10 octobre au 11 novembre 1995. Une montagne immortalisée par Hodler, mais ce ne sont pas ces paysages de Hodler qui sont montrés. La présentation des oeuvres de Hodler nous fait plutôt entrer dans la fabrique du peintre avec un choix important de 35 dessins, souvent de petits croquis et puis aussi 25 toiles. Toutes ces travaux proviennent des collections du Kunsthaus. Si ce sont plutôt les différences entre les artistes qui sont soulignées, on découvre aussi des similitudes par exemple avec la présentation des carnets de croquis de Schnyder. Les éléments tirés du quotidien prennent la stature de sculptures, d’installations, ainsi un assemblage de chiffons imbibés de peinture, la bicyclette, le sac à dos ou les chaussures du peintre, sans oublier son chevalet. L’exposition n’est pas accompagnée d’un catalogue au sens traditionnel, elle est pourtant marquée par deux publications, un livre oblong reproduit les vues du lac de Thoune par Schnyder et une feuille au format affiche reproduit une partie des œuvres de Hodler avec la liste de toutes les pièces exposées.

L’exposition de Jean-Frédéric Schnyder au musée d’art contemporain de Bâle (2007) occupe la grande salle du 2ème étage. Elle rassemble plusieurs centaines de peintures, sculptures et objets couvrant toute son activité. Aucun cartel dans l’exposition qui donne un titre ou une date pour les oeuvres exposées! Le catalogue est un grand album reproduisant les oeuvres, mais il n’y a aucun texte.

La Sainte Trinité, La Vierge à l’enfant avec l’âne et le boeuf; une très grand bâche sur laquelle est peinte une danse des morts, voici quelques unes des peintures les plus importantes par leur dimension qui frappent le regard du spectateur lorsqu’il entre dans cette salle. Par ailleurs on retrouve différentes séries de petites toiles sur Berne, sur le coucher de soleil au bord du lac de Zoug, sur le chien de l’artiste ou encore une suite de paysages, sans oublier des compositions abstraites. De nombreux objets et sculptures évoquent un goût et une virtuosité pour la réalisation de toutes sortes de bricolages, Schnyder a toujours affirmé une affinité avec les techniques de l’artisanat. L’une de ses dernières pièces est un ensemble de petits berceaux réalisés avec des coquilles de noix. Il a taillé un totem représentant les membres de sa famille. Il réalise aussi des masques en terre cuite peinte qui révèlent une imagination débordante.

Jean-Frédéric Schnyder s’inspire de l’histoire de l’art à toutes les époques, mais aussi des traditions populaires et des formes triviales de l’expression visuelle, il s’amuse avec les catégories du kitsch, de l’art populaire, du bricolage et de l’Art. Toujours soucieux d’intégrer la pratique artistique dans un contexte social et historique, il rend aussi perceptible le caractère jubilatoire d’une technique maîtrisée.

Bâle Museum für Gegenwartskunst, Jean- Frédéric Schnyder du 28 avril au 26 août 2007.

Museum im Bellpark Kriens: Jean-Frédéric Schnyder Ausstellung 2012 jusqu’au 17 février 2013.

Je n’étais jamais allé à Kriens dans la banlieue de Lucerne, à 10 – 15 minutes en bus de la gare de Lucerne. Bellpark est un parc qui abrite un grand chalet et tout près une villa transformée en musée. En face, contraste saisissant, on trouve un centre commercial récent avec Migros, poste, logements, etc. C’est dans ce cadre que Schnyder présente ses derniers travaux dans lesquels il renoue avec la sculpture.

Il y a toujours dans le travail de Schnyder une tension entre ironie, voire même satire véhémente et sérieux, sans que l’on sache trop sur quel pied danser !

Ici toute la villa du Bellpark est imprégnée d’une musique de fanfare populaire que le visiteur entend constamment. C’est la bande son d’une vidéo présentée au sous-sol sur trois grands écrans et huit petits, intitulée, Schnapsparade. On y voit des chariots en bois tirés par des chevaux qui transportent de petites bouteilles d’alcool. Ils avancent sur un rail et sont filmés. On retrouve ces 16 chariots comme des jouets dans une vitrine du premier étage sous le titre Corso 2009. A l’image d’un travail qui se déploie entre ironie et taille très sérieuse du bois de châtaignier. De petits signes en relief sont accrochés à une paroi, Nase, 2006 – 2011, un relief en bois coloré représente un paysage: Bild, 2005/2006. Ou bien c’est la maquette de tout un village, Dörfli, 2010/2012, 16 maisons en carton grillagées occupent une salle et font penser à un projet d’urbarnisation. Les quatre pièces intitulées, Tessinerstühle, 2010 évoquent plutôt des serpents ou d’étranges crocodiles vertébrés.

En 2001: Jean-Frédéric Schnyder, Zugerstrasse/Baarerstrasse 1999-2000 à la Graphische Sammlung de l’école polytechique fédérale de Zurich jusqu’au 21 décembre 2001. Pendant plus d’une année, J.-F. Schnyder a photographié l’un après l’autre les bâtiments d’une rue de Zoug. Le projet, hommage à Ed. Ruscha?, se concrétise dans une publication. L’exposition présente les étapes de la démarche de digitalisation et de montage impliqué par ce travail.