Claude Monet

Je réunis sur cette page plusieurs compte-rendus d’expositions Monet.

Bâle Riehen 2017

En 2017, la Fondation Beyeler fête ses vingt ans. Elle débute l’année par une exposition Claude Monet. Il faut relever que c’est la troisième fois qu’on retrouve cet artiste dans le titre d’une exposition de la Fondation, mais c’est la première fois qu’il est présenté seul. Une approche très pointue qui se concentre sur les toiles crées entre 1880 et 1905 environ. Il faut dire que la collection Beyeler possède plusieurs toiles majeures de l’époque où Monet n’était plus impressionniste, ce qui lui permet d’avoir un excellent point de départ pour présenter cette période moins connue de l’artiste.

Installé à Giverny dès 1883, Monet jouit d’une reconnaissance et d’un succès qui lui permettent de développer son bassin des nymphéas tout en voyageant un peu. Les toiles choisies montrent comment il se concentre sur l’évocation de mouvements qu’il s’agisse du rythme des vagues ou des passages du brouillard à Londres, ombres, lumière et mouvement sont représentés en mettant en évidence la touche picturale.

Dans six salles les 62 oeuvres sont réunies par thèmes: les arbres, la côte méditerranéenne, la côte normande, la Seine, Londres et les nymphéas.

Une lecture amusante et érudite qui concerne précisément la période retenue pour cette exposition : le roman policier de l’historien d’art Adrien Goetz, Intrigue à Giverny, une enquête de Pénélope, 2014.


Le Grand Palais à Paris propose une rétrospective Claude Monet du 22 septembre 2010 au 24 janvier 2011.


Bâle Riehen 2009

Fondation Beyeler: Venise. De Canaletto à Turner et Monet jusqu’au 25 janvier 2009, prolongée jusqu’au 15 février. La Fondation annonce 185’000 visiteurs au 22 janvier.

C’est pour marquer le centième anniversaire du séjour de Monet à Venise d’octobre à décembre 1908 que la Fondation Beyeler a décidé d’organiser une grande exposition consacrée à Venise vue par les peintres. Elle se concentre sur la période 1880 – 1910, mais consacre des salles aux prédécesseurs avec Canaletto, Guardi et Turner très largement représenté par une salle de toiles et une salle d’aquarelles. Un ensemble important d’oeuvres de Monet forme ainsi le coeur de l’exposition. L’exposition se poursuit avec une salle consacrée à Signac, une autre à Odilon Redon puis l’on découvre les gravures et les dessins de Whistler et l’exposition s’achève avec un autre américain John Singer Sargent. Par ailleurs des photographies d’époque sont présentées et au sous-sol on découvre deux photographes contemporains: Vera Lutter et David Claerbout, ce dernier propose de fascinantes visions nocturnes de Venise. Patrick Schaefer, L’art en jeu 27 septembre 2008.


Paris 2005

Galeries nationales du Grand Palais Turner, Whistler et Monet jusqu’au 17 janvier 2005

L’exposition présente quelques groupes d’oeuvres illustrant chacun un aspect des relations, affinités, influences entre les trois artistes. On découvre quatre épisodes principaux, le premier est en fait une exposition dossier autour du tableau de Monet Impression Soleil Levant. Il montre d’une façon remarquable la composante anglaise dans la naissance de l’impressionnisme. Pour éviter les anachronismes, les cartels des oeuvres de Turner indiquent à partir de quelle date elles furent visibles.

Le deuxième établit des affinités entre les nocturnes de Whistler et certaines vues de la Seine par Monet en 1897, il évoque encore Mallarmé et la réception de Turner.

Le troisième montre les différents séjours de Monet à Londres et le quatrième s’attache à la vision de Venise proposée par les trois artistes. L’exposition est parsemée de citations d’artistes, d’écrivains, Mallarmé surtout, de critiques et d’historiens de l’époque qui ont souligné les affinités entre ces créateurs.

On comprend ainsi qu’il s’agit d’une construction, l’amitié entre Whistler et Monet d’une part, leur fascination commune pour Turner d’autre part. D’une ampleur relativement limitée l’exposition fait ressortir les spécificités de chaque démarche et les relations, les admirations qui les relient. Elle exalte particulièrement les aquarelles de Turner, les vues de Suisse et de Venise ressortent ici avec une intensité exceptionnelle, inégalée. Il me semble que la confrontation avec les toiles de Monet et de Whistler les fait vibrer beaucoup plus que lorsqu’elles viennent compléter une présentation de toiles de Turner lui-même. Le choix de mettre sur le même mur et de confronter directement l’oeuvre phare de l’impressionnisme, Impression Soleil Levant avec une petite aquarelle de Turner des années 1830-1840 est audacieux et impressionnant!

En multipliant les citations l’exposition montre aussi le discours qui acccompagne les travaux des artistes, discours qui n’est pas une vérité absolue, car on sait bien que d’autres expositions monographiques ont montré que lorsque l’on considère l’évolution interne de l’oeuvre de Turner, elle apparait bien éloignée des impressionnistes et qu’il existe de nombreuses autres sources de ce mouvement. L’approche choisie est tout à fait intéressante, mais se limite à documenter la conception des artistes et de leurs proches.


A signaler que le Kunsthaus de Zurich présente une importante exposition Claude Monet Le jardin de Monet du 29 octobre au 27 février 2005


Bâle Riehen 2002

Fondation Beyeler Bâle: « Claude Monet … jusqu’à l’impressionnisme numérique » jusqu’au 04 08 02

Cette exposition propose de considérer l’influence de l’oeuvre tardif de Claude Monet sur la peinture à partir des années 1950. Présentée auparavant à Munich l’exposition s’intitulait Claude Monet et les modernes. Un volet consacré à l’image numérique et une installation d’Olafur Eliasson sont venus compléter l’étape bâloise.

Il s’agit d’une présentation importante de 46 toiles de Monet : il faut dire que les Nymphéas sont chez eux dans ce bâtiment qui abrite en permanence un triptyque important de cette série auquel renvoie par ailleurs le bassin situé à l’entrée du musée. Plus loin l’influence de la découverte de l’oeuvre tardif sur la peinture américaine et française dès les années 1950-1960 est documentée par des toiles importantes de Pollock, Newman, Rothko, Sam Francis, Joan Mitchell par exemple, mais aussi Dubuffet, Yves Klein, Cy Twombly ou encore Anselm Kiefer. La démonstration en réunissant les travaux de grande qualité de 30 artistes est un peu énumérative. Certes ces œuvres ont toutes pour point commun l’abandon de la ligne d’horizon, l’investissement complet de la surface de la toile par la peinture, mais ce rapprochement de travaux qui sont par ailleurs très différents et dont l’émergence s’explique par des approches tout à fait distinctes, voire fondamentalement opposées est finalement assez étrange. Enfin en partant de toiles de Robert Ryman l’exposition s’achève sur une interrogation sur l’avenir de la peinture à l’ère du numérique, elle prend en considération la vidéo et des recherches sur ordinateur.

En fait l’exposition propose les œuvres d’un certain nombre d’artistes qui comme le fit Monet placent le spectateur dans une situation d’immersion : immersion visuelle dans la couleur, le mouvement de la lumière. Ce qui pose un problème, car certains des artistes sélectionnés peuvent sembler à une première lecture formelle proposer une telle immersion, alors même qu’ils introduisent une autre dimension dans leur démarche comme la mise en évidence du processus de création chez Dubuffet par exemple ou d’une autre manière chez Yves Klein.

Par la suite intervient encore un élément important de distanciation qui est l’ironie. Les peintres qui relèvent plus ou moins de l’étiquette néo-géo qui pratiquent cette ironie n’ont pas été retenus, par contre il est certain qu’un Nam June Paik travaille de manière critique sur la notion d’immersion du spectateur telle qu’elle peut être proposée par la peinture, la photographie, le cinéma ou la télévision. Les rapprochements essentiellement formels proposés par cette exposition ne font pas ressortir ces distinctions et ne laissent aucune place à la distanciation. L’idée est de montrer l’actualité de l’œuvre de Monet pour le reconsidérer à l’ère de l’image numérique comme on l’a reconsidéré à l’ère de la peinture abstraite et des Color Fields.

Après la lumière, l’ornement la Fondation Beyeler propose une nouvelle mise en perspective originale. Monet avait offert à la France ses Grandes Décorations, les Nymphéas de l’Orangerie. Elles furent inaugurées en 1927, une année après la mort de l’artiste. Les toiles non utilisées pour cette décoration demeurèrent roulées dans son atelier. Michel Monet les fit découvrir après la Seconde Guerre mondiale à quelques amateurs et une exposition fut organisée à la Kunsthalle de Bâle en 1949. Les premières toiles n’apparurent sur le marché qu’en 1952 et c’est en 1955 que certains musées commencèrent à s’y intéresser (cf. Reinhold Hohl, Monet und die moderne Malerei, pp. 13-19 du catalogue de l’exposition, Claude Monet …bis zum digitalen impressionismus, Fondation Beyeler, 2002). Bien que l’Orangerie ait toujours pu être visitée, la décoration de Monet tomba peu à peu dans l’oubli, elle fut restaurée peu après la guerre. Patrick Schaefer, L’art en jeu, 7 avril 2002