Monnaie de Paris: Subodh Gupta, Adda, Rendez-vous jusqu’au 26 août 2018
Le bamyan qui occupe la cour de la Monnaie de Paris est très révélateur de la démarche de Subodh Gupta. On assiste chez cet artiste à un étonnant développement foisonnant à partir de l’exploitation d’objets quotidiens employés en ready made. Ces réalisations plastiques toujours plus monumentales évoquent la culture indienne. Face au succès et à l’ampleur des expositions qu’il réalise, il a pris le chemin de la monumentalité . Par rapport à l’exposition recensée plus bas, il y a cinq ans, on constate que cette monumentalité entraîne une diminution de la diversité, mais il reste fidèle à sa démarche de médiatisation d’aspects de la culture indienne à travers ce chemin matériel.
Subodh Gupta. Spirit Eaters. Musée des beaux-arts de Thoune jusqu’au 28 avril 2013
es assemblages de Subodh Gupta (né en 1964) sont familiers des visiteurs d’expositions intenationales. Gupta a fait des ustensiles de cuisine en fer blanc, caractéristiques des ménages indiens et qui ont frappé tout voyageur qui s’est rendu dans ce pays, la base emblématique de son travail. En quelques années, il est parvenu à transformer un objet industriel pauvre à nos yeux, omniprésent, en œuvre d’art immédiatement associée à son nom.
Subodh Gupta traite des questions de nourriture. Il les met en évidence dans une problématique qui est simultanément identitaire et globalisée. Il fait plusieurs fois allusion à l’état dont il est originaire le Bihar qui possède une longue frontière avec le Népal. De ce point de vue, deux pièces sont particulièrement caractéristiques dans l’exposition. Un film qui donne aussi un titre à cette dernière : Spirit Eaters. Il évoque une tradition funéraire du Bihar qui veut que l’on engage des hommes pour manger le plus possible lors de la mort d’un proche pour satisfaire l’âme du disparu. Gupta a engagé de ces hommes pour faire un film sur leur activité dans une forme de happening à l’Art Fair de Delhi en 2012. Dans une autre salle, on trouve un tapis roulant à sushis, mais sur ce dernier, il a placé des pyramides d’ustensiles indiens associant deux cultures culinaires exotiques que l’on rencontre aujourd’hui dans le monde entier (Faith Matters 2007-2008). La plupart des pièces exposées sont assez récentes et dans plusieurs travaux, il évoque des situations du quotidien: une table sur laquelle de la pâte à pain est en cours de malaxage (Atta, 2010) ou une machine à coudre avec des mangues (Season, 2013), il s’agit de reproductions en bronze peint, parfaitement illusionniste; une traduction artistique de situations très quotidiennes. (Il me revient à l’esprit que l’artiste suisse, très globalisé, Ugo Rondinone a réalisé des travaux assez proches avec de pommes, poires, pommes de terre ou une miche de pain en bronze peint qui créent une évocation hyperréaliste). Pour revenir à Gupta, il faut reconnaître que ses assemblages exercent toujours une certaine fascination par leur ampleur et un certain pouvoir d’évocation, mais d’un autre coté ils ont quelque chose d’attendu. S’il fallait le mettre en relation avec un précédent artistique, c’est le nom de Yannis Kounellis auquel je pense, peut-être parce qu’à Thoune, il y a une pièce avec des sacs de jute, mais de manière plus générale le mode opératoire me semble assez comparable. Kounellis évoque des matières, le métal, la fonte, le verre, des tissus, le coton, la jute, des produits, le café, le sel, le charbon par exemple pour leur donner le statut d’œuvre d’art un peu comme Gupta.
Patrick Schaefer, l’art en jeu 4 avril 2013