La Fondation de l’Hermitage à Lausanne consacre une importante rétrospective à Marius Borgeaud jusqu’au 25 octobre 2015
Petit maître ou grand peintre ?
Marius Borgeaud (1861 – 1924). Né en Suisse, Marius Borgeaud hérita d’une grande fortune qu’il dilapida. Arrivé à la quarantaine, il se tourna vers la peinture pour gagner sa vie. Curieusement il semble y être parvenu rapidement. Après quelques hésitations autour du paysage post-impressionniste. Il se spécialisa dans les scènes d’intérieur, les mairies, les pharmacies ou même les galeries d’art, sans oublier bien sûr les natures mortes. Tout à fait français d’esprit et peu attaché à son pays d’origine, il garda pourtant des liens avec des compatriotes comme Edouard Morerod, Félix Vallotton et Paul Vallotton. Les critiques de l’époque le situèrent entre les atmosphères intimes et acides de Vallotton et la naïveté du Douanier Rousseau qui rencontrait un écho énorme au début du XXe siècle et dont l’œuvre était connue de Borgeaud. Des rapprochements confirmés aujourd’hui ; quelques toiles de ces deux artistes ont été discrètement glissées dans les salles et l’on constate qu’elles s’intègrent fort bien. Après une brève carrière d’une vingtaine d’années, Borgeaud décéda non sans avoir interdit tout exposition de son œuvre avant 20 ans. Il tomba ainsi dans l’oubli et fut progressivement redécouvert à Lausanne dans les années 1950. Ainsi, bien que sa carrière fût parisienne, modeste, mais parisienne, sa fortune critique posthume est exclusivement vaudoise. Le musée cantonal des beaux-arts de Lausanne, le musée d’art de Pully, ainsi que le musée Jenisch à Vevey possèdent les ensembles les plus représentatifs de son œuvre. Depuis 1993, les connaissances sur l’artiste ont pris un fort essor grâce à une association des amis et la publication d’un catalogue raisonné en 1999. L’exposition actuelle est l’aboutissement de toutes ses recherches et met particulièrement en valeur l’œuvre de Borgeaud dans le cadre d’une belle maison bourgeoise du 19e siècle, quoique la présentation des toiles consacrées aux mairies, pharmacies et autres intérieurs dans la galerie du sous-sol lui convienne aussi fort bien.
Après avoir évoqué les débuts consacrés au paysage et placés sous l’emprise d’Alfred Sisley, l’accrochage est avant tout thématique et met en évidence le travail par séries, la répétition des mêmes éléments avec de légères variations d’une toile à l’autre.
Assurément la peinture de Borgeaud est plutôt destinée à être dégustée à petite dose. Pourtant la rétrospective malgré le côté répétitif des séries donne l’occasion de prendre la mesure de l’ampleur de l’activité du peintre. Il sut concentrer ses dons sur quelques éléments et ne se lança pas dans de grandes aventures artistiques, il ne cherchait pas à expérimenter sur le plan technique. L’exposition donne à chacun l’occasion de se forger une opinion personnelle pour répondre à la question: Marius Borgeaud, petit maître ou grand peintre?